L’actualité commentée

Février 2016

Mandat d’arrêt non signé : inculpé libéré

Le 25 février 2016

En ce mois de janvier 2016, un homme accusé de l’assassinat de sa femme a été privé de sa liberté et mis en prison avant son procès. Il était donc en détention préventive. Deux jours plus tard pourtant, il était libéré ! Le mandat d’arrêt qui l’envoyait en prison n’avait pas été signé par un juge d’instruction, ce qui est obligatoire.

Pourquoi cette signature est-elle si importante ?

Garant des libertés

En Belgique, la détention préventive doit être exceptionnelle. Elle est possible lorsqu’un suspect pourrait commettre d’autres actes illégaux, risquerait de détruire des preuves ou de prendre la fuite. Ou encore d’avoir des contacts avec d’autres suspects.
Seul le juge d’instruction peut décider d’une détention préventive. La loi est claire : il doit signer lui-même le mandat d’arrêt et y faire figurer son sceau (mais celui-ci seul ne suffit pas). À défaut de cette signature, l’inculpé est remis en liberté. C’est ce qui s’est passé au mois de janvier.
Dans ce cas, un nouveau mandat d’arrêt ne peut pas être décerné pour les mêmes faits sauf en cas de nouvelles et graves circonstances ou si, par négligence ou volonté de se soustraire à la justice, le suspect ne se présentait pas à un acte de procédure d’une certaine importance.
Le juge d’instruction est le garant des libertés fondamentales du suspect : jusqu’au procès, il est le seul à pouvoir décerner un mandat d’arrêt ou de perquisition, à décider d’écoutes téléphoniques, etc. La signature, indispensable, indique que le mandat d’arrêt émane bien de celui dont le nom est mentionné sur le document (donc du juge d’instruction) et non du boucher ou de l’épicier du coin. En signant, le juge atteste que c’est bien lui qui décerne ce mandat d’arrêt. C’est particulièrement important pour un acte aussi grave que la privation de liberté d’une personne toujours considérée comme innocente.

Pas de système judiciaire démocratique sans respect des règles

Cette obligation d’une signature de mandat d’arrêt par un juge d’instruction pourrait sembler formelle : le public pourrait penser que le contenu du mandat est plus important que la signature. Mais attention : admettre qu’un mandat d’arrêt puisse être décerné sans la signature d’un juge d’instruction pourrait être dangereux. En effet, considérer qu’il n’est pas important qu’une règle soit respectée risquerait d’entrainer le non-respect d’autres règles. Et donc, de mettre en péril le droit à la liberté individuelle de tout un chacun.

Commentaires

  1. Mandat d’arrêt non signé : inculpé libéré

    10 mars 2016

    Georges-Pierre Tonnelier

    Un autre garde-fou, auquel il me semble que, dans le cadre de l’affaire qui nous occupe, il n’a guère été prêté attention, est l’obligation qu’a le directeur de la prison de vérifier la légalité du mandat d’arrêt en vertu duquel la police lui amène, privée de liberté, une personne, et lui demande de l’’incarcérer.

    Si le directeur de la prison accepte dans son établissement pénitentiaire une personne qui n’y est pas amenée en vertu d’un titre légal, il se rend lui-même coupable de détention arbitraire par un fonctionnaire public, ce qui est une infraction pénale...

    Code pénal, art. 147. Tout fonctionnaire ou officier public, tout dépositaire ou agent de l’autorité ou de la force publique, qui aura illégalement et arbitrairement arrêté ou fait arrêter, détenu ou fait détenir une ou plusieurs personnes, sera puni d’un emprisonnement de trois mois à deux ans.
    L’emprisonnement sera de six mois à trois ans, si la détention illégale et arbitraire a duré plus de dix jours.
    Si elle a duré plus d’un mois, le coupable sera condamné à un emprisonnement d’un an à cinq ans.
    Il sera, en outre, puni d’une amende de cinquante [euros] à mille [euros] et pourra être condamné à l’interdiction des droits indiqués aux n°s 1, 2 et 3 de [1 l’article 31, alinéa 1er]1. 42, art. 2, En vigueur : 01-01-2002>

    Comment se fait-il que le directeur de la prison ait accepté d’incarcérer le député Van Eyken, dès lors que la police n’était pas en mesure de présenter un mandat d’arrêt dûment signé par un juge d’instruction, et pour cause ?

    Georges-Pierre Tonnelier
    Juriste