On croyait que l’« affaire Wesphael » était terminée, et voilà qu’elle fait à nouveau parler d’elle ! M. Wesphael a été accusé du meurtre de sa femme et il a été acquitté par la Cour d’assises. Mais la famille de la victime a entamé une nouvelle procédure, cette fois devant une juridiction civile.
Le jugement a été rendu ce 8 mai 2018. Il rejette la demande de la famille.
Mots-clés associés à cet article : Responsabilité civile , Responsabilité pénale
Cette affaire compliquée nous permet d’examiner la différence entre « la responsabilité pénale » et « la responsabilité civile ».
En d’autres mots, chacun de nous, si nous nous comportons « mal », pouvons être amenés à répondre de nos actes devant les tribunaux. Nous pourrons alors être sanctionnés. Mais il y a différentes formes de sanction :
- soit une peine : nous « payons » alors à l’ensemble de la société pour notre mauvais comportement ; on parle de responsabilité pénale ;
- soit une réparation : nous indemnisons la victime de nos actes ; on parle de responsabilité civile.
1. La responsabilité pénale
La personne mise en cause devant une juridiction pénale (le prévenu, l’accusé) peut être déclarée coupable d’avoir commis une infraction pénale et, dans ce cas, elle sera condamnée à une peine.
La juridiction pénale doit vérifier les points suivants :
A. Est-ce que cette personne est bien l’auteur des faits dont on l’accuse ?
B. Est-ce que les faits qu’elle a commis répondent à toutes les conditions de l’infraction pénale ?
Par exemple : Une personne est accusée de meurtre. Elle a donné des coups à une autre personne, qui en est morte. Selon la loi, une des conditions de l’infraction de « meurtre », c’est « l’intention de tuer ». Si le tribunal estime que, suite à l’enquête, il n’y a pas de preuve que l’auteur des coups avait l’intention de tuer, il ne pourra pas qualifier les faits de meurtre. Mais il pourra trouver une autre infraction pénale qui correspond aux faits commis. Par exemple, il déclarera l’auteur coupable de « coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner ».
C. Est-ce que la personne avait conscience de ce qu’elle faisait et a-t-elle agi volontairement ?
Par exemple : si la personne était atteinte d’un trouble mental grave qui la rendait inconsciente de ses actes, elle serait considérée comme irresponsable pénalement et une peine ne pourrait pas être prononcée. Davantage d’explications sont données à ce sujet dans l’article suivant : « Une chambre de protection sociale ‘juge’ les personnes irresponsables de leurs actes ».
2. La responsabilité civile
Une personne peut être déclarée civilement responsable et, dans ce cas, elle sera condamnée, non pas à une peine mais à une réparation : elle devra indemniser la victime, c’est-à-dire lui payer des dommages-intérêts. Il s’agira d’un paiement, d’une espèce de remboursement pour les dommages, donc les torts subis.
Le juge doit vérifier les points suivants :
A. Est-ce que la personne a commis une faute ?
La notion de « faute » civile est beaucoup plus large que celle d’infraction pénale. On parlera de « faute » pour
- soit une infraction pénale :
Par exemple : une personne brûle un feu rouge et emboutit une voiture dans le carrefour : c’est une infraction pénale, mais c’est aussi une faute civile.
- soit n’importe quel comportement qu’une personne ne doit normalement pas avoir dans la vie en société. Cette notion vise donc beaucoup de situations et le juge doit, dans chaque cas, apprécier s’il y a faute on non.
Par exemple : le fait de ne pas nettoyer son trottoir après qu’il ait neigé n’est pas une infraction pénale, mais cela peut constituer une faute civile puisqu’il devient dangereux de marcher sur ce trottoir à cause du verglas.
B. Est-ce qu’il y a un dommage ?
On parle aussi de « préjudice » :
Par exemple : le conducteur du véhicule embouti a été blessé : il aura donc des frais médicaux pour se soigner ; il se peut qu’il n’ait pas pu aller travailler pendant un certain temps et il subira alors une diminution de ses revenus. Il peut aussi avoir un dommage moral en raison des souffrances qu’il a endurées.
C. Le dommage est-il bien une conséquence évidente de la faute ?
Il faut que la faute soit bien la cause directe du dommage.
Par exemple : les blessures du conducteur sont en lien direct avec la faute de celui qui a brûlé le feu rouge.
Lors du même accident de voiture, un piéton a été distrait parce qu’il regardait ce qui se passait et il est tombé en heurtant un poteau. Il est commotionné. Mais ce dommage n’est pas en lien de causalité directe avec la faute du conducteur.
3. Les rapports entre la responsabilité civile et la responsabilité pénale
La victime d’une infraction pénale peut donc demander la réparation de son dommage. Elle peut, à son choix :
- soit « se constituer partie civile » devant la juridiction pénale,
- soit introduire une demande devant une juridiction civile (mais, dans ce cas, s’il y a un procès pénal, il faut attendre qu’il soit clôturé).
Si la juridiction pénale acquitte la personne accusée, soit elle n’est pas l’auteur des faits qui lui étaient reprochés, soit ces faits ne constituent pas une infraction pénale. Cette décision s’impose à tous : à la victime, à l’auteur, mais aussi au juge civil.
Comme il n’y a pas d’infraction pénale, il n’y a pas non plus de faute civile. Pour ces faits, la personne qui s’estimait victime ne peut pas réclamer des dommages-intérêts à la personne accusée.
Par exemple : une personne est accusée d’avoir porté des coups à une autre. Elle est poursuivie devant le tribunal correctionnel pour coups et blessures. La personne qui s’estime victime de ces coups se constitue partie civile. Si la personne accusée est acquittée (par exemple, on ne peut pas déterminer précisément qui a porté les coups), il n’y a pas de faute civile. La personne constituée partie civile n’aura pas droit à une réparation. Celle-ci ne peut pas non plus agir ensuite devant une juridiction civile pour réclamer la réparation de ces faits.
Par contre, la personne qui se considère comme victime peut introduire une demande devant une juridiction civile contre la même personne mais en invoquant d’autres faits : elle soutient alors que ces autres faits constituent une faute civile qui lui a causé un dommage.
Par exemple : dans le procès Wesphael, l’accusé a été acquitté du meurtre de sa femme. Les proches de la victime ne peuvent donc pas lui réclamer des dommages-intérêts en prétendant qu’il est l’auteur du meurtre.
Mais ils ont introduit une demande devant une juridiction civile en invoquant d’autres faits : ils estiment qu’il a commis des fautes qui ont abouti à cette mort et qu’il en est donc civilement responsable. Le tribunal civil ne leur a cependant pas donné raison : il a estimé que l’affaire avait été définitivement jugée par la Cour d’assises.
De manière générale, ce genre de demande se heurte à beaucoup de difficultés. Notamment des difficultés de preuve. Devant le juge civil, c’est le demandeur qui doit prouver ce qu’il affirme. Et il ne dispose pas de moyens comparables à ceux du ministère public ou du juge d’instruction : ceux-ci sont les seuls à pouvoir utiliser des moyens de contrainte : une perquisition, une saisie de documents, un interrogatoire, des écoutes téléphoniques, etc
Affaire Westphael : responsabilité pénale / responsabilité civile, quelle différence ?
11 mai 2018
Schobbens Michel
Je pense que dans cette affaire, au vu de tous les commentaires parus dans la presse, la famille devrait pouvoir obtenir un procès en responsabilité civile
car même s’il n’est pas coupable de meurtre, il était présent et aurait probablement
pu lui porter secours, ou moins appeler les secours avant qu’il ne soit trop tard.
Mais qui me dit que ces commentaires de la presse sont exacts ?
L’enquête devrait pouvoir le déterminer
Quand au message de Nadine : c’est peut-être vrai mais c’est caricatural et ne
peut-être généralisé !
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Affaire Westphael : responsabilité pénale / responsabilité civile, quelle différence ?
12 mai 2018
Nadine
Très cher Michel,
Je vous sens fatigué aujourd’hui. Au lieu de balancer des rumeurs comme on enfile des perles, pensez à vous hydrater et merci pour la rigolade.
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Affaire Westphael : responsabilité pénale / responsabilité civile, quelle différence ?
11 mai 2018
Nadine
C’est le principe de la justice de clavier, modernisation de la justice de comptoir, qui prétend régler en deux lignes péremptoires des milliers d’affaires, en affichant une totale indifférence , un abyssal mépris, pour les victimes.
L’un des fondements de la Justice, la vraie, celle qui se rend dans les tribunaux, c’est le principe du contradictoire qui veut que le juge entende aussi les plaignants, et pas seulement l’accusé. Accusé qui, bien évidemment, proteste à peu près systématiquement de son innocence.
Une fois diplômés, les juges ne sont jamais sanctionnés et poursuivent une carrière programmée, quoi qu’ils fassent.
Civile ou pénale importe peu, les "élites" ont de bons avocats et beaucoup de complices.
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Affaire Westphael : responsabilité pénale / responsabilité civile, quelle différence ?
12 mai 2018
Gisèle Tordoir
Uniquement du fait des expériences judiciaires vécues personnellement, je partage totalement l’avis de Nadine. Malheureusement, monsieur Schobbens, trop d’erreurs judiciaires, dans l’impunité totale, lui donnent raison. Contrairement à vos propos, son avis n’a rien de caricatural car il ne déforme en rien la triste réalité. Hélas, c’est là qu’est l’os : Nadine et moi savons de quoi nous parlons.
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Affaire Westphael : responsabilité pénale / responsabilité civile, quelle différence ?
14 mai 2018
André
Madame Nadine,
Je ne comprends pas votre position.
Monsieur Westphael a bien été jugé par une Cour d’Assise et un jury populaire a bien tranché eu égard aux données par les parties présentées par devant lui. Donc, que voulez-vous dire par Justice de clavier ?
Pour ma part, si vous le permettez, j’ai trouvé que l’enquête avait été bizarrement menée. On savait dans la presse, avant que le juge d’instruction ne donne ses...instructions, ce qui allait se passer et quels seraient les résultats des tests à l’avance etc. C’est pourquoi, de mon point de vue qui n’engage que moi, nul autre résultat n’aurait pu "tomber" que l’acquittement totale du prévenu.
Non ?
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