L’actualité commentée

Février 2023

Des demandeurs d’asile à la rue

La Belgique ne respecte pas des décisions de Justice

Le 17 février 2023

Depuis plus d’un an et demi, des personnes et des familles, venues d’ailleurs, qui demandent à être reconnues comme réfugiées en Belgique, se retrouvent à la rue. Elles sont sans logement, sans nourriture, sans soins, sans aide de l’État pour faire face à leurs besoins les plus élémentaires.

Or, la plupart d’entre elles y ont droit ! Comment est-ce possible qu’elles se retrouvent dans cette situation ?

La protection internationale : un droit

Une personne qui craint pour sa vie ou sa sécurité dans son pays peut arriver en Belgique et souhaiter y vivre. Elle doit alors officiellement s’adresser à l’Office des étrangers pour y faire une demande d’asile. C’est le premier pas pour espérer obtenir ensuite, si elles en remplissent les conditions, le statut de « réfugié » et donc le droit de vivre en Belgique. C’est ce qu’on appelle la protection internationale, organisée le 28 juillet 1951 par la Convention de Genèverelative au statut des réfugiés’ et ratifiée par la Belgique.
Dès l’introduction de leur demande, ces personnes, alors reconnues « demandeuses d’asile », ont droit à une aide matérielle (hébergement, nourriture, etc.). « Fedasil » c’est-à-dire à l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile doit alors les prendre en charge et leur fournir cette aide matérielle et, particulièrement, un hébergement. Selon la loi, les demandeurs d’asile doivent être logés et, le plus souvent, envoyés dans des centres de Fedasil ou de la Croix-Rouge. Ils y attendront une convocation du Commissariat général aux réfugiés et apatrides (CGRA) qui décidera ensuite de leur octroyer ou non le statut de réfugié.
Depuis plus d’un an et demi, Fedasil ne fournit plus cette aide matérielle à tous les demandeurs d’asile et donc nombreux d’entre eux se retrouvent à la rue.

Plus de 7000 condamnations

Selon les associations qui viennent en aide à ces personnes, l’État belge a les moyens de les accueillir mais ne le fait pas. C’est pourquoi des avocats se sont adressés aux tribunaux belges au nom de leurs clients demandeurs d’asile pour faire respecter leurs droits. Le tribunal du travail, concerné dans ces situations, a condamné plus de 7000 fois Fedasil à offrir immédiatement l’aide nécessaire aux demandeurs d’asile concernés, sous peine de devoir leur payer des astreintes (et donc une certaine somme d’argent par personne et par jour).
Mais, dans la majorité des cas, les gens sont restés à la rue. Il faudrait environ quatre mois entre le moment de la condamnation et l’hébergement réel de la personne demandeuse d’asile. Selon les associations qui aident les demandeurs d’asile, l’attribution des places dans les centres est illogique, imprévisible et aléatoire.

À la Cour européenne des droits de l’homme

Puisque la situation n’évoluait pas, les avocats et associations se sont alors adressés à la Cour européenne des droits de l’homme pour obtenir la condamnation de la Belgique pour atteinte à leurs droits. En même temps, ils lui ont demandé de prendre des mesures provisoires pour obliger l’État belge à respecter les décisions déjà prises et donc à fournir un hébergement et une aide matérielle aux demandeurs d’asile.
Dans des situations exceptionnelles, la Cour peut en effet prendre des mesures provisoires lorsque des recours sont introduits devant elle. C’est le cas quand les personnes concernées seraient exposées à « un risque réel de dommage grave, imminent et irréparable ». C’est ce que dit l’article 39 du règlement de la Cour européenne des droits de l’homme.

Rien ne bouge

Depuis plus de trois mois, la Cour a donc ordonné une série de mesures provisoires concernant des demandeurs d’asile toujours sans hébergement depuis leur arrivée en Belgique. À chaque fois, elle impose à l’État belge de se conformer à la décision du tribunal du travail et donc de procurer un hébergement et une assistance matérielle pour faire face à leurs besoins élémentaires.
De plus, elle précise qu’un État qui ne se conforme pas à une décision prise en lien avec l’article 39 peut violer l’article 34 de la Convention européenne des droits de l’homme. Ce dernier garantit le droit pour toute victime d’une violation de la Convention européenne des droits de l’homme de pouvoir aller en recours devant la Cour européenne des droits de l’homme.

Des astreintes, oui mais…

Ces mesures provisoires ne sont pas appliquées, la Belgique ne respecte toujours pas les décisions de ses propres tribunaux qui ont condamné Fedasil.
Fedasil a payé certaines astreintes mais beaucoup d’autres s’accumulent, sans être payées.
Avec l’aide d’huissiers, certaines des personnes qui en ont bénéficié tentent maintenant de saisir (c’est-à-dire d’emporter, de prendre) des objets appartenant à Fedasil. Vendus, ces objets (mobilier, décoration, œuvres d’art, etc.) devraient permettre d’obtenir de l’argent nécessaire pour payer les astreintes.

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