Une correspondante de Questions-Justice nous demande pourquoi le tribunal de commerce s’appelle depuis le 1er novembre 2018 « tribunal de l’entreprise », alors qu’à première vue, il ne semble pas y avoir de grandes différences entre les deux juridictions.
Bénédicte Inghels, conseiller à la Cour d’appel de Mons et ancien juge au tribunal de commerce de Mons, nous explique cette adaptation
Mots-clés associés à cet article : Tribunal de commerce , Tribunal de l’entreprise
Ce changement de dénomination n’est pourtant pas purement symbolique ou cosmétique.
Le tribunal de commerce concernait les « commerçants ». Ces commerçants étaient donc des personnes qui « commerçaient » autrement dit, en résumé, achetaient et vendaient des marchandises et des services. Cette notion datait du début du XIXe siècle et du vieux Code de commerce, qui, depuis, a été presqu’entièrement « détricoté » et remplacé par d’autres lois.
Au fil du temps, de nombreuses activités économiques n’ont plus été considérées comme étant du commerce. Des notaires, des médecins, des agriculteurs, des associations sans but lucratif (asbl) comme les hôpitaux, des kinésithérapeutes, des infirmiers, des consultants n’étaient pas considérés comme des commerçants. Ils ne dépendaient donc pas de la compétence du tribunal de commerce mais étaient jugés par des juridictions civiles comme la justice de paix et les tribunaux de première instance. Cela avait un impact notamment sur les règles de preuve :
- devant ces juridictions civiles, on ne peut pas prouver n’importe comment ce que l’on soutient devant le juge (on dit que la preuve est « réglementée ») ;
- devant les anciens tribunaux de commerce, on dit que la preuve est libre, ce qui veut dire que les commerçants, sous le contrôle du juge bien entendu, pouvaient utiliser les modes de preuve qu’elles souhaitent.
Vu l’évolution de la notion de « commerçant », le législateur a décidé de la supprimer et de la remplacer par celle, plus large, d’« entreprise ». Les avocats, les agriculteurs, les logopèdes par exemple, sont maintenant considérés comme étant des « entreprises ». En cas de litiges, ils se retrouvent maintenant, comme les commerçants, devant le tribunal de l’entreprise. Celui-ci a donc nettement plus de compétences que l’ancien tribunal du commerce.
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