Avec les rentrées scolaires revient le débat sur les frais scolaires, permis ou pas permis, et si permis, devant aussi respecter certaines conditions. Un jugement en justice de paix, à Namur, nous permet de décoder ce sujet.
Mots-clés associés à cet article : Enseignement , Frais scolaires , Gratuité scolaire
Madame X, mère de famille, est convoquée devant le juge de paix par l’école secondaire de son enfant : elle n’a pas payé treize factures relatives à différents frais scolaires, pour une somme totale de 776,50 euros. Comme la famille ne payait pas, l’école s’est adressée à une société de recouvrement c’est-à-dire une entreprise spécialisée qui intervient entre le créancier et le débiteur, donc ici entre l’école et la famille, pour obtenir le paiement d’une dette. Cette société a demandé à la famille de payer celle-ci en lui envoyant une lettre recommandée appelée « mise en demeure ». La famille n’a toujours pas payé. L’école s’est alors adressée à la justice et demandé au juge de paix d’obliger la mère à payer.
Que dit la loi ?
En Belgique, l’enseignement obligatoire (jusqu’à 18 ans donc) est gratuit. La Constitution l’affirme, ainsi que la Fédération Wallonie-Bruxelles. Mais, selon un décret de cette Fédération (« Communauté française » est sa dénomination officielle), il y a des exceptions à la règle et certains frais peuvent être demandés par exemple pour des photocopies, l’accès à la piscine, certains déplacements… Deux conditions importantes doivent alors être respectées :
- l’établissement scolaire doit, à l’avance, prévenir les parents par écrit et leur préciser une estimation des frais qui seront demandés ;
- l’établissement doit tenir compte de la situation sociale et culturelle de la famille, ce qui signifie que les frais demandés doivent être adaptés à la situation financière de la famille ; en effet, si l’école ne tient pas compte de cette situation financière, certains élèves pourront payer ces frais et d’autres pas : tous les élèves n’auront donc pas les mêmes chances de bénéficier de cet enseignement et l’école doit aussi assurer des chances égales d’insertion sociale à tous les enfants.
Mêmes chances pour tous
La famille concernée n’a pas répondu à la convocation de la justice : elle n’avait pas d’avocat et ne s’est pas présentée au tribunal.
Le juge a pourtant tranché en sa faveur, contre l’école qui lui demandait d’obliger cette famille à payer les frais. Ce juge de paix a estimé que la facturation de ces frais scolaire était illégale, pour deux raisons. Premièrement, la première condition n’a pas été respectée : la famille n’a pas été préalablement informée d’une estimation des frais. Deuxièmement, la seconde condition n’a pas non plus été respectée : l’école n’a pas pris en compte la situation sociale et culturelle de la famille.
Le juge s’est référé aux lois belges mais aussi à d’autres textes internationaux pour argumenter sa décision. Ainsi le Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels, adopté par l’Assemblée générale de l’ONU en 1966, reconnait « le droit de toute personne à l’éducation », ce qui implique que « l’enseignement primaire soit être accessible à tous » et que « l’enseignement secondaire […] soit généralisé et rendu accessible à tous par tous les moyens appropriés et notamment par l’instauration progressive de la gratuité ».
La Convention relative aux droits de l’enfant ne dit pas autre chose.
Sources :
Carte blanche du Rassemblement wallon de luttes contre la pauvreté : « Quand la justice fait respecter les droits des personnes appauvries » : www.rwlp.be
Le Soir - 6/11/2019 : Enseignement : le jugement qui relance le débat sur les frais scolaires – Eric Burgraff
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