Fouad Belkacem, animateur de Sharia4Belgium, a été condamné pour terrorisme. Le parquet a demandé à la Cour d’appel d’Anvers de le déchoir de sa nationalité belge.
Dans certaines conditions, certains Belges peuvent effectivement perdre leur nationalité.
Qui sont ces Belges ? Pour quoi et comment peuvent-ils perdre leur nationalité ?
Mots-clés associés à cet article : Belkacem , Apatride , Déchéance de nationalité , Naturalisation
Si l’on nait Belge de parents belges ou si l’on nait Belge de parents étrangers eux-mêmes nés en Belgique, on ne peut pas perdre sa nationalité.
Par contre, si l’on est devenu Belge après sa naissance, on peut, dans certaines conditions, être déchu de cette nationalité.
Une restriction cependant selon la loi belge : une personne qui ne possède que la nationalité belge ne peut pas non plus être déchue parce que tout citoyen doit posséder une nationalité : il ne peut être « sans patrie » et donc devenir « apatride ».
Différents motifs de déchéance
Une personne ayant malhonnêtement agi pour obtenir la nationalité belge peut la perdre. Par exemple, un homme devenu Belge après avoir donné de fausses informations sur son identité ou falsifié des documents peut être déchu.
Un citoyen n’étant pas né Belge peut aussi être déchu de sa nationalité si, par son comportement, il manque gravement aux devoirs d’un citoyen belge (selon l’article 23 du Code de la nationalité belge).
De même, une condamnation à une peine d’emprisonnement d’au moins cinq ans, sans sursis, pour des crimes et délits contre la sûreté de l’État, pour des violations graves du droit international humanitaire, pour terrorisme, trafic d’êtres humains ou encore pour une infraction qui a pu être commises parce que l’intéressé possédait la nationalité belge, est un motif de déchéance (articles 23/1 et 23/2 du même Code).
Enfin, les personnes ayant acquis la nationalité belge à la suite d’un mariage avec un Belge, mariage ensuite été annulé parce qu’il existait uniquement pour obtenir cette nationalité. C’est ce qu’on appelle un « mariage blanc ».
Qui peut décider une déchéance de nationalité ?
Seul un tribunal ou une cour peut décider une déchéance de nationalité. Ce peut être une cour d’appel, s’il s’agit de fraude ou d’un comportement manquant aux devoirs d’un citoyen belge, ou la juridiction pénale qui a prononcé une condamnation précisée par les articles 23/1 et 23/2. Le tribunal civil annulant un mariage déchoit également de cette nationalité le conjoint devenu Belge grâce à ce mariage.
Dès qu’un jugement ou un arrêt est prononcé, la personne en cause cesse d’être Belge.
Quatre questions préjudicielles
Fouad Belkacem est devenu belge en 1997 tout en conservant sa nationalité marocaine. Il fait donc partie des Belges qui peuvent, à certaines conditions, perdre la nationalité belge puisqu’il a été condamné pour terrorisme à une peine de prison de douze ans.
Sur cette base, le parquet a demandé cette déchéance de nationalité à la Cour d’appel d’Anvers puisqu’il a gravement manqué à ses devoirs de citoyen belge.
Avant de juger, la Cour d’appel veut toutefois être certaine que sa décision respectera bien la Constitution belge. C’est pourquoi elle a posé quatre questions – appelées « préjudicielles » (cela veut dire « avant de juger ») – à la Cour constitutionnelle. Ces questions sont complexes mais nous les détaillons parce qu’elles montrent bien qu’une loi, apparemment simple, avec un objectif clair, doit aussi tenir compte d’un cadre bien plus large, qui résulte de règles supérieures, comme la Constitution ou la Convention européenne des droits de l’homme. Le rôle de la Cour constitutionnelle est de vérifier que toutes ces règles supérieures, lorsqu’elles sont liées à la Constitution, sont respectées. Voici les questions :
1. La différence qui existe entre les personnes nées Belges et celles qui le sont devenues pendant leur minorité quand leurs parents le devenaient, respecte-t-elle bien le principe d’égalité de tous les Belges ?
2. Une personne ne peut être punie deux fois pour les mêmes faits. Belkacem a déjà été condamné pour des manquements graves à ses devoirs de citoyen. Le retrait de nationalité pourrait-il être considéré comme une deuxième sanction pour les mêmes faits ?
3. Privé de nationalité belge, Belkacem ne pourrait plus résider en Belgique puisqu’il deviendrait un étranger. Cette interdiction est-elle compatible avec le droit à la vie privée et familiale, spécialement si les membres de la famille de l’intéressé résident en Belgique ?
4. La quatrième question se demande si l’article 23 du code de la nationalité est bien compatible avec l’article 23/1 : l’article 23 précise seulement que ceux qui ont manqué à leur devoir de citoyen peuvent être déchus. Il ne précise pas pour quels faits ni dans quel délai, après ces faits, la demande de déchéance doit avoir lieu. Par contre, l’article 23/1 énumère certaines infractions qui peuvent justifier une déchéance et en précise les conditions, notamment de délais, pour introduire la demande de déchéance.
Fin 2017, les réponses de la Cour constitutionnelle à ces questions devraient être connues. En attendant, la Cour d’appel d’Anvers suspend sa décision.
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